MC5 – Heavy Lifting

 

Malgré les apparences, Heavy Lifting n’est pas un album de MC5. Enfin si, mais là non, ou du moins pas vraiment. C’est en réalité le chant du cygne de Wayne Kramer, guitariste et auteur-compositeur du groupe proto-punk de Detroit fondé à son initiative en 1964. Soixante ans plus tard, quand le projet d’album a vu le jour, les seuls membres du groupe originel encore vivants étaient Kramer et le batteur Dennis Thompson. C’est donc avec un sentiment bizarre que l’on réalise que ce quatrième album officiel voit le jour alors que Kramer et Thompson sont tous deux décédés en 2024. Wayne en février et Dennis en mai. Bien que Thompson soit aux drums sur deux morceaux, et que Kramer soit aux commandes en écrivant 12 des 13 morceaux, la question se pose. Célébration fantomatique? Oui et non ou alors peut-être, faut voir quoi.

Ce n’est pas surprenant, Heavy Lifting est musicalement très différent de ce que le Motor City Five a gravé sur Kick Out the Jams en 1969, Back in the USA en 1970 ou le High Time de 1971 et dans les faits, la set list se rapproche d’avantage de ce que Wayne Kramer a offert en solo au cours des années 90, pas tout à fait ou presque. À ceci près que notre guitar hero parvient à réaffirmer son statut de vétéran du proto-punk avec de bons morceaux et une dose conséquente d’arrogance, hélas mise à mal par un son trop formaté années 80. C’est Bob Erzin (Kiss, Alice Cooper, Pink Floyd, etc.) qui est aux commandes d’une production tapageuse beaucoup trop clinquante qui sied mal à la folie et à l’énergie brutale planquées dans nos mémoires auditives. Des invités de marque (Slash, Tom Morello, Vernon Reid et Tim McIlrath) apportent leur contribution à un album somme toute intéressant qui peut être considéré comme l’œuvre finale d’un combo, certes assagi, qui n’a jamais fait de concession à la scène rock et qui y revient pour lever le rideau sur un dernier acte qu’il ne faudrait surtout pas mésestimer. Ça c’est sûr!

Patrick BETAILLE, octobre 2024

MC5 – Kick Out The Jams

MC5 Kick out the Jams

[Extrait]:Kick out the Jams motherfuckers or get off the stage″ (Envoie la sauce enfoiré ou barre toi de la scène!) C’est par ces mots que Rob Tyner (chant), accompagné des guitaristes Fred Sonic Smith et Wayne Kramer, avait pour habitude de harceler les groupes qui partageaient la scène avec lui. Régulièrement, la formation du Michigan se faisait arrêter pour violences, obscénités ou grossièretés; parfois même, les musiciens n’avaient même pas le temps de monter sur scène que le police était déjà à la manœuvre. Le premier album du MC5 sort en février 1969 sur le label Elektra. C’est un live enregistré les 30 et 31 octobre 1968 au Grand Ballroom de Detroit lors de la fête d’Halloween. Protopunk par excellence, ce disque comporte entre autres titres ravageurs Ramblin RoseRama Lama Fa Fa Fa et Starship Figure aussi Kick out the jams qui donne son titre à l’album et qui devient l’objet de nombreuses polémiques, notamment avec la maison de disque qui d’emblée impose une version édulcorée sur laquelle Motherfuckers ″ est remplacé par Brothers’n’Sisters ″. Le terme fuck″, lui, reste présent sur l’intérieur de la pochette qui sera rapidement censurée. Pour ne rien arranger, le célèbre journaliste musical Lester Bangs, écrit dans Rolling Stone que le disque est ridicule, ennuyeux et prétentieux . Dès lors, certains disquaires refusent de vendre l’album allant même jusqu’à menacer le label de stopper les ventes de tous ses artistes. Craignant pour la discographie des Doors, eux aussi au catalogue, Elektra prend la décision de se séparer du groupe. Brûlot live sans concession, Kick out the jams, marquera définitivement l’histoire de la musique rock. Les 8 titres rendent compte sans fioriture de la provocation, de la puissance et de la sauvagerie des prestations scéniques du Motor City 5, par ailleurs magnifiquement représentées sur la jaquette réalisée à partir de clichés du photographe Joel Brodsky. And right now… right now… right now, it’s time to… kick out the jams, motherfuckers ″!

Patrick BETAILLE, janvier 2019


L’intégralité de la chronique est à retrouver dans le livre:

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