[ Source France Info ]: Selon Willy Ronis, ce cliché est le seul pour lequel il a demandé à son modèle de se mettre en scène. Le petit Parisien avec sa baguette dans les rues de Paris, c’est Jean Brosseron. A l’époque, en 1952, il avait 5 ans. Aujourd’hui, il se souvient comme si c’était hier que le photographe lui avait demandé de courir en sortant de la boulangerie. ″ Ravi de rendre service et de faire l’intéressant, j’ai couru avec ma baguette. Le monsieur a pris ses photos et ensuite, je suis rentré chez moi. Très fier, je l’ai dit à ma mère, mais elle ne m’a pas cru et m’a répondu : et moi, je suis la reine d’Angleterre″ raconte, amusé, le septuagénaire.
Rien n’échappait au regard de Willy Ronis (1910 – 2009). Né à Paris, ce photographe (ukrainien du côté de son père et lituanien de celui de sa mère) commence la photo à 18 ans et devient professionnel indépendant à partir de 1936. L’époque tumultueuse riche en mouvements sociaux est propice aux commandes. Il photographie les grèves chez Citroën, les défilés communistes, les manifestations ouvrières et les habitants des quartiers populaires. Mobilisé en 1939, il revient à Paris mais, étant juif, il ne peut demander l’autorisation de travailler et part se réfugier à Marseille. À la Libération, la presse a besoin de témoignages visuels. Ronis revient donc à Paris. Là, il shoote les amoureux, leurs retrouvailles, le retour des prisonniers de guerre, les ouvriers et la vie des quartiers pauvres. Rien n’échappe à son regard engagé sur les prolétaires, les politiques, les artistes et surtout les petites gens qu’il aime profondément. Comme son copain et collègue d’agence (Rapho) Robert Doisneau, il immortalise également les bistrots d’après-guerre où règnent le ballon de rouge et le demi, parfois seules échappatoires à la misère ambiante. Ces rescapés des ravages de la guerre parviennent encore à trouver la force de sourire – de rire parfois – et deviennent sans le savoir les acteurs d’une réalité émotionnelle qui donne de la force et de la tendresse à cet humanisme qui caractérise l’œuvre du Photographe. Willy Ronis sur Artnet.