Consacrée photographe de l’année en 2009, Patricia de Gorostarzu excelle dans le reportage dont l’authenticité fait abstraction de toute approche tapageuse bon marché. Un goût prononcé pour les voyages et les rencontres l’ont conduite entre autres et à plusieurs reprises aux Etats-Unis d’où elle a ramené des témoignages qui resteront à jamais le lien émotionnel entre la nostalgie du vécu et la part de rêve enfoui au plus profond de chacun d’entre nous. On retrouve ainsi certains de ces clichés dans le magnifique ″d’ Est en Ouest″ (paru en 2002), ouvrage qui laisse s’exprimer les paysages, les objets mais aussi les visages qui jalonnent la Mother Road (en français: La Routeuh Soissanteuh Sisseuh). Plus récemment et dans Vintage America il s’agit cette fois de 200 photographies cadrées au cours d’un road trip de quelques 20 000 kilomètres à travers l’Arizona, le Nouveau-Mexique, mais aussi le Texas, le Colorado ou la Californie. Dans ce livre paru en 2010 le temps semble s’être arrêté sur une époque révolue mais toujours présente dans les mémoires empreintes d’images de magazines, d’ambiances cinématographiques et de musiques déversées par les Juke Box, radios et autres Teppaz. C’est là toute la force du recueil: rendre éternelle une Amérique d’aujourd’hui qui ne fait plus illusion en mettant en valeur les vestiges d’un rêve qui est en train de s’effacer comme un vieux Pola. Au fil des pages on se retrouve tantôt au cœur d’une toile d’ Edward Hopper, tantôt en compagnie de Wim Wenders, parfois même aux abords d’un Bagdad Café où se produirait Johnny Cash. Comme un prolongement à la nostalgie ambiante on croise aussi des individus désabusés, alcooliques, dépressifs ou paumés, héros malgré eux des cinq nouvelles qui viennent donner une dimension si particulière aux images de cette autre Amérique que Patricia de Gorostarzu saisit à merveille : ″… Ses clichés ont un caractère spontané, comme s’ils avaient été pris depuis une voiture en mouvement et, en même temps, ils sont méticuleusement cadrés…″ (extrait de la préface de Kyle Eastwood).
Patrick BETAILLE, juillet 2012