Derek Trucks – Mad Dogs & Englismen

 

Flash-back: le 12 mars 1970 Joe Cocker apprend de son management qu’une tournée aux USA est programmée à partir du 20 mars. Dans l’urgence et avec l’aide de Leon Russel il recrute au pied levé des musiciens de Delaney & Bonnie (dont Rita Coolidge) et du Grease Band (dont Chris Stainton). L’événement a fait l’objet d’un enregistrement historique au Fillmore East les 27 et 28 mars publié au mois d’août.
En 2015, le Tedeschi Trucks Band rendait hommage à ce légendaire Mad Dogs & Englishmen de l’ex plombier de  Sheffield au cours d’un concert enregistré au Lockn’ Festival en Virginie.
Aujourd’hui, dix ans après cette prestation et 45 ans après l’édition originale, parait enfin ce témoignage hors du commun. on le sait, à eux seuls Susan Tedechi et son guitariste de mari Derek Trucks sont capables d’enflammer n’importe quelle scène. Avec les intervenants de la première heure Leon Russell et Rita Coolidge, imaginez un peu les frissons supplémentaires. Et si de surcroît Doyle Bramhall II, Chris Robinson des Black Crowes et Warren Haynes sont invités, la fête atteint son paroxysme.
Plus qu’un sommet musical de 70 minutes, Mad Dogs & Englishmen Revisited – Live At Lockn’ est une vibrante célébration du blues, de la soul et du rock, avec des titres cultes comme The Letter, Delta Lady, Feelin’ Alright, The Weight et bien sûr… With a Little Help from my Friends!

Patrick BETAILLE, septembre 2025

Sideburn – Loaded

 

Winchester, cartouchières pleines, bâtons de dynamite, flingue, le patibulaire enjoué de service annonce la couleur: ça va défourailler sévère. Avec une dizaine d’albums à leur actif depuis 1997, les helvètes de Sideburn bivouaquent autour d’un classic rock authentique bien ancré dans les seventies. Son vintage, riffs puissants et refrains accrocheurs nourrissent un répertoire le plus souvent influencé par Cold Chisel, AC/DC ou Rose Tattoo, les piliers du rock australien si chers à  Airbourne. Depuis l’excellent Fired up paru en 2022, la discographie des fondateurs Roland Pierrehumbert (chant) et Lionel Blanc (batterie) était en stand by pour cause de tournées soutenues et de changements de line up.
C’est donc avec un indéniable plaisir que l’on retrouve le combo avec ce Loaded, nourri des productions précédentes. Chargé jusqu’à la gueule, ce double LP comporte 37 titres extraits des grands classiques dont certains ont été réenregistrés: Ghost of 1980 (to Bon Scott), Voodoo Girl, Gimme the way et Rock’n’Roll Outlaw de Rose Tattoo. L’occasion également de faire appel aux potes compatriotes de Gotthard sur deux autres titres: le guitariste Leo Leoni œuvre sur Hell on wheels et le chanteur Nic Maeder vocalise sur Gangster lover. Onze live viennent aussi témoigner de ce dont est capable Sideburn quand il s’agit de faire passer le message on stage. Enfin, et c’est à noter au titre de l’ouverture des hostilités: Devil’s Daughter, une vraie nouveauté qui annonce la couleur dans la plus pure tradition du rock électrisant. Attention aux balles perdues!

Patrick BETAILLE, septembre 2025

The Hives – Forever The Hives

 

Il faut quand même une bonne dose de culot et d’humour pour intituler un album ″ Pour Toujours et à Jamais! ″. C’est pourtant ce qu’osent les membres de The Hives – groupe en son temps modestement autoproclamé ″ meilleur groupe live de la planète ″ – qui posent aujourd’hui couronnés et vêtus de manteaux d’hermine et dont le leader Pelle Almqvist clame à qui veut l’entendre: ″ Nous sommes au sommet de notre art.

Depuis le boom du garage rock au début des années 2000, les rockers venus du froid suédois ont survécu à quasiment tous leurs alter egos grâce à une formule simple : un look impeccable, du gros son et une énergie sans faille. Avec The Hives Forever, Forever The Hives enregistré dans les studios de Benny Andersson d’ABBA, ils sonnent plus enragés que jamais. Ce septième album est bâti sur une véritable poudrière et un inconscient en manque de Sonics ou de Fleshtones a allumé la mèche. Résultats, 12 titres qui vous pètent à la gueule pour vous prouver que le rock, le vrai, n’est pas mort et qu’en toute royale modestie ce sont The Hives qui l’ont sauvé.

Patrick BETAILLE, septembre 2025

John Fogerty – Legacy

 

Après plusieurs décennies de batailles juridiques avec Fantasy Records, John Fogerty a finalement obtenu les droits d’édition de son catalogue. Mais il a aussi réalisé que jamais il ne possèderait les enregistrement originaux de Creedence Clearwater Revival. Qu’à cela ne tienne! Même si à 80 ans le chanteur-guitariste-compositeur n’a plus rien à prouver, il a fait le choix de relever le défi: réenregistrer une bonne partie des marqueurs de la musique américaine. Legacy, le bien nommé Creedence Clearwater Revival Years, regroupe 20 classiques du groupe revisités en famille. Une bonne parie de la tribu Fogerty s’est retrouvée en studio pour finaliser le projet pour le moins exigeant. Shane est à la guitare et à la basse, Tyler à la guitare, à la basse et aux claviers et Kelsy à la batterie. Malgré les ans, la voix de John n’a rien perdu et les gosses assurent à merveille pour honorer leur héritage avec une précision métronomique. Au point qu’à quelques détails minimes près l’on croirait entendre Up Around the Bend, Proud Mary, Travelin’ Band, Bad Moon Rising, Born on the Bayou, Fortunate Son et tous les autres interprétés à la grande époque par Doug Clifford, Stu Cook et Tom Fogerty qui aujourd’hui déclare:  » Soit on est complètement différent, soit on fait de son mieux pour sonner exactement pareil. C’était un challenge passionnant, dit-il en ajoutant:  ″ Pendant la majeure partie de ma vie, je n’ai pas été propriétaire des chansons que j’avais écrites. Les récupérer change tout « .

Aussi bons soient-ils, ces nouveaux enregistrements sont-ils meilleurs que ceux de feu Creedence Clearwater Revival ? Franchement non mais on s’en fout. Avec ces John’s Versions, Legacy permet de renouer avec les titres de l’un des plus remarquables groupes de l’histoire du rock et ses cinq albums classés dans le Top Ten entre 1968 et 1970.

Patrick BETAILLE, août 2025

 

Céré – Made In Rock’n’Roll

 

Pau, en bas à gauche sur la carte de France. Pau, préfecture du département des Pyrénées-Atlantiques. Pau, son beth ceu, sa vue sur les Pyrénées, sa garbure, son roi Henry, quatrième du nom, et son François, notre… Premier Sinistre.
Et puis à Pau il y a aussi un haut dignitaire du wok’N’wol. Bien qu’ayant déjà eu l’occasion d’exprimer tout le bien que je pense de Didier Céré et de sa musique, une question subsiste. Bordel! Comment fait-il?
Presque cinquante ans que ce rocker pur et dur traine sa gouaille, ses tiags et ses guitares sur les routes de Navarre et d’ailleurs. Que ce soit avec les Rebels, Abilène, les Bootleggers ou en solo, contre vents et marées et musicalement très bien entouré, Didier a toujours diffusé la bonne parole en faisant preuve d’une énergie et d’une sincérité qui ne trompent pas. Pour preuve, sur sa route il a eu l’occasion de croiser les cordes avec des grands, y compris en ouvrant pour des pointures telles que Calvin Russel, Moon Martin, Toto, ZZ Top ou Johnny Halliday. Entre autres.
Moi qui pensais qu’après une bonne dizaine de disques, ce Rock Rebel paru en 2021 signifiait peut-être la fin d’une histoire discographique, je me suis magistralement foutu l’accordeur dans l’œil. Tant mieux! Le vieux rocker n’a pas tout dit! Les 11 titres du tout nouveau Made in Rock’n’Roll ont été enregistrés et mixés à Pau et – s’cusez du peu – mastérisés à Austin Texas.  Le Did reprend et adapte en français Breathless (Bad Bad Boy s’habille en Blouson noir), Brian Setzer (Radiation Ranch devient Le Rade des Zombies et Bruce Springsteen (pour Fire c’est Je Suis Toqué). Il rend aussi hommage à Johnny avec une version de Génération Perdue sorti en 1966. Quant au morceau qui offre son titre à l’album il s’agit ni plus ni moins que de Let the Good Times Roll de JD McPherson.
En plus de Jeremy Mondou (guitare) et Mickael Mazaleyrat (Harmonica), l’incroyable noyau dur des Bootleggers est renforcé par un aéropage de talents incontestés: Fred Chapelier, Neal Black et le canadien Redd Volkaert aux guitares, Red Young et Larry Telford de Point Blank aux claviers (les sudistes apprécieront!) et l’immense frenchie Michel Mondou au saxophone. Made In Rock’n’Roll est un album au titre qui veut bien dire ce que ça veut dire. Si vous cherchez de l’IA, de l’autotune et du vocoder passez votre chemin et allez vous faire téter les yeux chez Orelsan. Rendez vous plutôt au Rade des Zombies (putain quel morceau!); sans Salma Hayek (comprenne qui pourra!), la tournée des 11 shots ne vous coûtera que 17 euros service compris. Pour passer commande: txdidier@wanadoo.fr

Sinon, la discographie complète sous forme de singles et d’albums est disponible en écoute ou à l’achat ici: Bandcamp/Bootleggers!

Patrick BETAILLE, août 2025

The Blues Brothers – The Lost Recordings

© Z2 Comics

 

La suite des aventures des Blues Brothers, en bande dessinée cette fois. Inspiré du film de 1980, The Escape of Joliet Jake reprend l’histoire de Jake et Elwood Blues en 1997. Alors qu’il est en taule, Jake disparaît. Évasion? Enlèvement? C’est à un détective accompagné d’un jeune de l’orphelinat de Chicago où les frangins ont grandi qu’incombe la tâche de retrouver sa piste. Le scénario est écrit par Stella Aykroyd (fille du co-créateur Dan) et Evan Pisano (dont la défunte mère Judy était la veuve du co-créateur John Belushi. C’est Felipe Sobreiro qui illustre le livre préfacé par Dan Aykroyd.

D’ici la fin de l’année, l’éditeur Z2 Comics proposera une édition de luxe de la bande dessinée, avec de nombreux bonus, dont des tirages d’art, un coffret et même un harmonica. Mais la pièce maîtresse du lot est un vinyle bleu intitulé The Lost Recordings. Disponibles uniquement dans ce coffret, 13 enregistrements live inédits de Belushi et Aykroyd accompagnés des musiciens originaux du groupe. Des membres de Booker T. and the M.G.’s, des Bar-Kays, du groupe de Howlin’ Wolf et du groupe du Saturday Night Live de l’époque, dont Steve Cropper, Donald Duck Dunn et Matt Murphy. Ensemble ils reprennent des classiques comme Flip, Flop & Fly, Green Onions, Rubber Biscuit, Shot Gun Blues et bien sûr Soul Man, le hit de Sam & Dave.

Patrick BETAILLE, août 2025

Buddy Guy – Ain’t Done With the Blues

 

La dernière apparition de Buddy Guy datait du 16 avril 2025 dans Sinners, le drame horrifico-surnaturel consacré au blues du Delta et à la fin duquel il incarnait le rôle de Preacher Boy. Même si musicalement il n’a plus rien à prouver, le dernier des Blues Giants persiste et signe avec un vingtième album studio: Ain’t Done with the Blues.  ″ Cet album parle de mon parcours et des gens qui m’ont tant appris ″ explique Buddy. ″ Muddy, Wolf, Walter, Sonny Boy, BB… tous m’ont demandé de défendre le blues. J’essaie de tenir cette promesse ″.

À bientôt 90 ans, Buddy Guy est non seulement toujours debout mais il confirme également que grâce à sa passion, sa détermination et son jeu il est capable d’honorer ses engagements en allant encore plus loin avec 18 titres imprégnées d’âme et d’histoire. Une célébration à laquelle sont invités quelques uns de ceux qui, plus souvent qu’à leur tour, ont rendu hommage à la Musique du Diable. Joe Walsh (How Blues is That), Christone ″ Kingfish ″ Ingram (Where U At), Peter Frampton (It Keeps me Young), Joe Bonamassa (Dry Stick) et les Blind Boys of Alabama (Jesus Loves the Sinners). Entre hommages à John Lee Hooker (Hooker Thing), Lightning Hopkins (One for Lightnin’) et BB KIng (The Blues Chase the Blues Away), entre shuffle, gospel, R&B, Chicago blues et hymne méditatif (I Don’t Forget), l’ensemble vibre d’un chant expressif et d’une intensité électrique dont le guitariste a le secret. Ain’t Done With The Blues n’est pas une promenade nostalgique, pas plus qu’un résumé de carrière. C’est juste la preuve que Buddy Guy n’en a pas fini avec le blues et qu’il reste un artiste essentiel devant lequel on ne peut que s’incliner.

Patrick BETAILLE, août 2025

Orianthi – Some Kind of Feeling

 

Orianthi… Guitar hero au féminin ou taupe modèle? Pour trancher il suffit de garder en mémoire le fait que mademoiselle Panagaris a brillamment collaboré avec Alice Cooper, Dave Stewart et Richie Sambora. Il convient également de souligner que son style et son jeu lui ont valu l’honneur d’être souvent comparée à Joe Satriani, Steve Vai, Carlos Santana et même Eddie Van Halen. Au fil des ans, tout en jouant avec des légendes elle a continué à enrichir sa discographie personnelle. Dernière production studio en date, ce Some Kind of Feeling pour le moins intéressant.

Entre ballade sensuelle et profonde (Some Kind of Feeling et Heaven Right Here) et un blues rock intense partagé avec Joe Bonamassa (First Time Blues), Orianthi confirme ses qualités vocales avec les ambiances soul de Ghost et Call you Mine. Elle n’en oublie pas pour autant qu’elle est aussi là pour envoyer du bois et elle le prouve avec Dark Days Are Gone, What I’ve Been Looking For et une belle reprise de Sharp Dressed Man qu’elle a déjà eu l’occasion de jouer avec son compositeur: Billy Gibbons. Some Kind of Feeling possède une réelle identité musicale, entre puissance et élégance, technique et feeling. De quoi  bien démarrer la journée.

Patrick BETAILLE, août 2025

Alice Cooper – The Revenge of Alice Cooper

 

L’album du retour que tout le monde redoutait ″. Le message est clair. D’autant plus clair qu’à y regarder de plus près on peut lire aussi: ″ Le groupe des origines? 14 nouveaux titres? Pas de pitié? ″. Alice revient, sans son lapin mais en compagnie de ceux avec qui elle a écrit les plus belles pages du shock rock des seventies. Michael Bruce (Guitare), Denis Dunaway (Basse), Neal Smith (Batterie)  sont là pour revivre la grande époque de Love It to Death, Killer, School’s Out et Billion Dollar Babies. Un seul manque à l’appel: Glen Buxton, le guitariste disparu en 1997 à qui un hommage est rendu avec See you on the Other Side, titre dans lequel Alice chante : ″ à bientôt, je sais qu’un jour nous jouerons à nouveau ensemble ″.

Essayer de faire revivre le passé peut s’avérer délicat, voire risqué s’agissant d’une réunion d’anciens combattants. Même si les protagonistes affichent plus de 70 au compteur de leurs existences, The Revenge of Alice Cooper est une réussite. Certes, le rock horrifique de monsieur Furnier s’est considérablement assagi mais la magie opère toujours et l’alchimie est palpable. Pas d’esbroufe, la formation au complet accepte le temps qui passe et en fait un atout. Avec ses 14 titres l’album navigue sans temps morts entre rock, théâtralité, grandiloquence et même psychédélisme. Témoignage simple et  efficace de la part de ceux qui n’ont pas besoin de se réinventer pour prouver qu’il sont encore vivants.

Patrick BETAILLE, juillet 2025

Bruce Springsteen – Tracks II: The Lost Album

 

Tracks, sorti en 1998, regroupait déjà des pépites que les inconditionnels du Boss avaient recherché pendant des années et qui pour certains figuraient sur de rares bootlegs faisant l’objet de quêtes fébriles. Sept ans après, Bruce Springsteen remet le couvert avec Tracks II en commercialisant, sous forme de coffret, des inédits couvrant essentiellement les années 90, période au cours de laquelle le E Street Band avait été délaissé au profit d’une entame de carrière solo. Un véritable trésor: des albums ambitieux regroupant 83 titres qui pour certains avaient été mixés mais jamais publiés. De démos austères aux orchestrations grandiloquentes en passant par de l’americana gorgée d’émotions ou du gospel inspiré, chaque disque possède sa propre identité et braque les projos sur le talent du plus grand conteur de l’histoire du rock qui affiche 75 printemps et plus de 50 ans de carrière.

Tracks II est disponible en édition limitée de neuf vinyls ou sept Cd pour la modique somme de 285 à 350€ selon les versions, photos et livrets compris. Pour les fans qui souhaitent un point d’entrée plus abordable, une version complémentaire, Lost and Found: Selections from The Lost Albums, rassemble 20 titres de l’intégrale sur deux LP ou un CD.

Patrick BETAILLE, juillet 2025