Le lundi c’est permis – Roots

La musique est un arbre, raconte Salif Keita. Les racines sont la musique africaine traditionnelle, le blues. Le jazz c’est le tronc et les branches. Le rock, la soul, le reggae, le funk et toutes les autres musiques ce sont les fruits.

Music is a tree, says Salif Keita. The roots are traditional African music, blues. Jazz is the trunk and the branches. Rock, soul, reggae, funk and all other music are the fruits.

Patrick BETAILLE, novembre 2021

Vinyles – Ça fait rêver!

LES MANUSCRITS DE LA MER MORTE DU COLLECTIONNEUR DE DISQUES. Au bout de 40 ans, il est enfin à moi! Bel exemplaire en plus… regardez l’état de ces sillons!″ APRÈS DES MOIS DE NÉGOCIATIONS FASTIDIEUSES, IL VIENT D’ARRIVER! (Illustration Robert CRUMB).

Patrick BETAILLE, octobre 2021

Janis Joplin – Cheap Thrills

Big Brother & the holding company: Cheap ThrillsÀ l’époque, Janis Joplin est une folkeuse underground passablement déjantée et déjà bien atteinte par le Southern Comfort et les drogues.  Big Brother and the Holding Company lui, est un honnête petit groupe de blues rock de la scène californienne. L’idée de réaliser une fusion de ces  artistes revient à Chet Helms, alors programmateur des concerts à l’Avalon Ballroom de San Francisco. Une première prestation de ce mélange détonnant a lieu au Festival de Monterey en juin 1967 et en laissera plus d’un sur le cul, dont un certain Albert Grossman, l’imprésario de Bob Dylan qui décide de les signer. En août 1968, arrive dans les bacs l’un des disques les plus emblématiques de l’histoire du Rock. Le triomphe est aussi inattendu que total. Personne ne sait alors ce qui se cache derrière cette oeuvre magistrale. L’idée de départ du manager consiste en un enregistrement live. En mars 1968, du matériel est installé derrière une salle de Détroit où le groupe doit se produire. Mais le stress et une consommation excessive d’alcool et de drogues par les musiciens ruine le concert. À l’écoute des bandes inexploitables, Grossman est fou furieux et menace de rompre le contrat. Aussi, entre deux prestations le groupe d’entrer en Studio pour réparer les dégats. Sous pression, Big Brother a du mal à se faire à la discipline et aux contraintes techniques. Malgré tout plus de 200 bobines sont enregistrées et mixées par Janis et son guitariste Sam Andrew, assistés par l’ingénieur du son du moment. Au passage, tous les bruits d’ambiance ont été rajoutés. Le soit disant ″Live material recorded at Bill Graham’s Fillmore Auditorium″ ne relève donc que de judicieux repiquages de bruits de foules et autres ajoutés à la prestation studio. Premier point. A sa sortie, le disque est annoncé comme étant le premier de la formation et là aussi il s’agit d’une information erronée. En effet, un premier album a déjà été réalisé sur un petit label local mais son succès n’est pas allé au delà de la baie de Frisco et personne ne s’en souvient. Et de deux! La pochette maintenant. Janis et son groupe sont fans des comics underground et en particulier de ceux de Robert Crumb qui est sollicité pour concevoir la pochette. Le dessinateur met en oeuvre un projet jugé trop classique par le patron de CBS qui souhaite plutôt une photo du groupe dans le plus pur style hippie californien. La maison de disques engage un photographe de mode et investit dans un décor composé de tentures indiennes, d’éclairage art déco et d’un lit en cuivre. La little girl blue et les musiciens picolent énormément, consomment diverses drogues, font la fête et l’ambiance kitsch du studio dégénère rapidement en un bordel sans nom où tout ce beau monde délire à poil. Il fallait s’y attendre, aucune photo n’est exploitable. Le temps presse et au final Janis parvient à imposer le dessin de Robert Crumb, prévu au départ pour le verso, en tant que recto de l’album. Il s’agit d’une bande dessinée criarde sur laquelle figurent des visuels annonçant titre et crédits sous forme de bulles. La jaquette en question affiche également un faux sticker ″Approved by Hell’s Angels – Frisco″. En réalité, ennemis jurés, Hell’s Angels et Hippies ne se retrouvent qu’autour des points de vue que sont la marginalité, la route, le sexe et le LSD.  En prétendant à un soit disant ″approval″, Janis Joplin se souvient que les bikers musculeux ont fait partie de ses premiers fans et  souhaite ni plus ni moins que leur rendre hommage. Dernier point et pas des moindres: pour son travail Crumb a touché quelques 600 dollars et pourtant il se raconte que, pour tout dédommagement, l’artiste n’eut que le droit de toucher les seins de Janis. Faux aussi! En dépit de ces contrevérités et approximations, celui qui à l’origine devait s’intituler Dope, Sex and Cheap Thrills (NDLR: Drogues, Sexe et frissons bon marché) se retrouve classé premier au Billboard pendant huit semaines et y restera durant presque deux ans. Aujourd’hui encore Cheap Thrills reste l’un des témoignages les plus fulgurants du blues psychédélique californien, notamment grâce à une interprétation viscérale et inoubliable du titre composé en son temps par George Gershwin pour l’opéra Porgy and Bess: Summertime!

Patrick BETAILLE, mars 2019

Le Cover Art Emblématique en Livre: In Vinyle Veritas!

Robert Crumb – Chimpin’ the Blues!

Robert Crumb & Jerry Zolten: Chimpin' the BluesNé à Philadelphie en 1943 Robert Crumb est dans les années  soixante l’une des figures de proue du Comix Underground. A cette époque il acquiert une renommée confortable en publiant les aventures d’un chat paillard et obsédé, Fritz The Cat et celles d’un gourou cynique, Mr Natural. Ces aventures feront d’ailleurs l’objet de publications en France dans Actuel, l’ Echo des Savanes et Fluide Glacial. Dans ces magazines il est également question de témoignages humoristiques et déjantés sur le psychédélisme, les drogues (il connaît bien le sujet…), la libération sexuelle et les femmes. Les Femmes! Il les aime et les dépeint résolument avec des formes généreuses, maternelles et dotées d’ un caractère bien trempé. Crumb, qui  se décrit lui même comme ″un obsédé pervers et névrosé″, met en scène la gent féminine sur fond de relation ambivalente tantôt animée par la haine et la crainte, tantôt empreinte de fascination et de fantasmes sexuels. Le dessinateur a une autre passion: La musique. Même si a une époque il refuse de travailler pour les Rolling Stones (il n’aime pas leur musique!) il commet quelques pochettes de disques dont la plus célèbre reste incontestablement celle de Cheap Thrills pour le Big Brother and the Holding Company de Janis Joplin. Malgré tout et musicalement, c’est en tant que collectionneur de disques 78 tours que Robert Crumb se distingue. Il se passionne particulièrement pour la Country Music, le Jazz et le Blues Vintage, sachant que tout ce qui est postérieur à 1935 ne représente pour lui que très peu d’intérêt. Sorti fin 2013, Chimpin’ the Blues est le fruit d’une collaboration avec un ami, lui aussi collectionneur, Jerry Zolten. Ce dernier, historien en musique et professeur d’université invite Crumb en 2003 dans son émission de radio au cours de laquelle tous deux passent en revue quelques uns de leurs favoris parmi les 78 tours des années 20 & 30. Sur les 21 titres de ce disque 10 sont la transcription de commentaires éclairés de la part des deux spécialistes mais c’est la musique qui reste à l’honneur avec 11 titres rares qui à eux seul représentent un véritable trésor. Les amateurs de Blues Old Style et les fans de Crumb devraient être séduits par le contenu et le contenant de Chimpin’ the Blues.

Patrick BETAILLE, octobre 2014 

Le Cover Art Emblématique en Livre: In Vinyle Veritas!